HEGEMONIE CULTURELLE
Synthèse de la journée intercollective du 22 août 2020 à l’Unlearning Center de Bluefactory
Suite a plusieurs initiatives multiples et collectives et en réponse au besoin de constituer une opposition au discours de « retour à la normale » omniprésent depuis le début du déconfinement, un grand nombre de collectifs militants fribourgeois se sont réunis le samedi 22 août à l’Unlearning Center de Bluefactory.
La journée a vu se dérouler quatre plateaux consécutifs regroupant des collectifs liés à des thématiques proches, avant d’aboutir sur une table ronde générale et une soirée festive.
Le premier plateau concernait les luttes anticapitalistes et antiimpérialistes. La Plateforme Anticapitaliste Fribourg, Attac, Cuba-Si, et les Juristes Critiques ont pu développer leurs approches quant à la question du retour à la normale et de l’hégémonie culturelle. La PAF a brossé un portrait du capitalisme à l’ère néolibérale et des perspectives de lutte, Attac du fonctionnement global et solidaire du corps social, ainsi que de l’évasion fiscale, notamment à Fribourg, Cuba-Si a mis le point sur la centralité de l’impérialisme comme ennemi commun à toutes les luttes et les Juristes Critiques ont montré la dimension institutionnalisée de la quête de profit à court terme et a invité à une démocratisation des entreprises et de l’économie dans son ensemble. Une fois le débat ouvert au public, il a été question de savoir s’il est correct ou non de qualifier Fribourg de paradis fiscal ; de savoir s’il est pertinent de soutenir des initiatives existantes, comme celle pour des multinationales responsables ou encore la taxation des paiements numériques ; ou encore de savoir ce qu’il faudrait mettre en œuvre pour contrer le pouvoir de récupération et utilisation d’arguments sociaux dont font preuve les capitalistes depuis plus de deux siècles pour se donner une image bienveillante et ainsi voiler les divers maux que le capitalisme génère.
Pour le deuxième plateau, ce sont trois collectifs liés aux luttes féministes qui ont dans un premier temps tenu le micro : Grève des femmes, Appel d’elles et les Juristes Critiques. GDF a présenté l’histoire du mouvement, notamment le caractère convergent et intersectionnel de son manifeste et a évoqué l’actualité et le futur des luttes féministes. Appel d’elles a thématisé la question des femmes migrantes, les dimensions genrées des discriminations qu’elles subissent et le manque de formation du personnel sensé les accompagner. Les Juristes Critiques ont dans un premier temps montré le sexisme présent dans les lois, reposant sur un modèle hétéropatriarcal, puis parlé de féminisme abolitionniste anticarcéral, courant de pensée permettant une remise en cause large et intersectionnelle du système en place et tendant à l’abolition du système carcéral. La partie en plenum a permis de parler de la place de l’antispécisme dans les luttes, ainsi que de la charge mentale qui pèse sur les militantes.
Le troisième plateau était dédié aux luttes écologistes et regroupait Grève du Climat, Extinction Rébellion, Critical Mass, Faites du vélo, Pignon sur Strass et Fribourg pour le Climat. GdC a présenté son histoire et son calendrier, XR a fait le point sur la nécessité d’établir des pratiques claires et non moralisantes ainsi que sur celle de sortir du cadre net des institutions politiques traditionnelles. CM et PsS ont exposé leurs fonctionnements et buts, organisation de rassemblements spontanés de cyclistes pour le premier, atelier de vélo participatif pour le second. FplC a présenté leur lutte contre l’abattage des arbres et pour la piétonisation des rues. S’en est suivi une division du public en plusieurs groupes de discussions invitant à la réflexion et à la convergence des différentes luttes.
Le quatrième plateau a concerné les luttes antiracistes et aides aux réfugié∙es, avec Droit de rester, Poya Solidaire et Citoyens en Action pour la Démocratie et le Développement, collectif contre le racisme anti-noir∙es. DDR a présenté l’affaire des violences du centre fédéral de renvoi de Giffers et les enjeux de sa médiatisation, notamment la recrudescence des violences envers les migrants qui a suivi. PS a démontré l’inhumanité et l’absurdité du traitement infligé aux personnes soumises au régime d’aide d’urgence, l’humiliation derrière leur condition et le fait qu’iels soient constamment amendables dans la rue. CADD a exposé les différences tendances propres existant dans le militantisme antiraciste et les violences subies par les populations noires en Suisse. Le plenum a mis sur la table la question du rapport aux institutions policières, avec des témoignages notamment. Il a été question de l’importance de l’urgence que les populations blanches prennent conscience de leurs privilèges et se sentent concerné∙es par la question. L’idée a été lancée d’organiser des ateliers sur comment réagir à des situations de discrimination, sur le modèle de ceux organisées par le collectif Mille Sept Sans contre le harcèlement de rue.
Le dernier plateau était dédié à revenir sur les points importants et les mettre en commun. Il s’est ouvert sur la présentation d’un nouveau médium, le Colvert du Peuple, qui pourra notamment, à travers son calendrier, servir de plateforme d’information collective à toutes les luttes. Ensuite, nous nous sommes activé∙es à créer différents groupes de travail pour la mise en pratique des discussions ayant eu lieu durant la journée.
- Comment éviter que nos luttes soient récupérées par l’idéologie dominante ?
- Antispécisme dans les luttes
- Féminisme et abolition de la prison
- Sexisme, racisme, LGBTIphobies en milieu militant
- Multiplicité des tactiques et grève générale
- Organisation d’une future journée intercollective
Outre le dernier, tous ces groupes de travail sont dédiés à l’organisation d’une soirée de discussion dédiée dans le cadre des InFoCo, événements d’information continues se déroulant une fois par mois à la Coutellerie. Si vous êtes intéressé∙e∙s à rejoindre ces groupes de travail, des personnes de contact sont spécifiées sur la page Facebook de la journée intercollective.
À 19h s’est ouverte la partie festive de la journée, avec un repas à prix libre puis un concert du groupe Octante-et-Onze à 21h. C’était une ambiance très belle et enthousiasmante.
Pour ce qui est des mesures liées à l’épidémie de Covid, tout ce qui était possible a été mis en place pour éviter la contamination. Liste de présence, gel hydroalcoolique, disposition de masques, distanciation sociale, couloirs à sens unique, service de la nourriture et des boissons. Ces mesures n’ont pas empêché une jolie convivialité et des échanges de connaissances et d’expérience très formateurs.
Par Timy
